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Le bracelet électronique pourra-t-il désengorger les prisons au Sénégal ?


Le Sénégal a inauguré mardi un centre de surveillance électronique marquant un début d'effectivité du placement sous surveillance électronique.


Ce dispositif permettra de suivre à la trace l’individu placé sous surveillance électronique.

Ce qui veut dire que les juges peuvent désormais placer certains condamnés ou inculpés sous surveillance électronique.

Selon le ministre de la Justice du Sénégal Ismaila Madior Fall, la surveillance électronique est une « alternative aux détentions provisoires. »


Une innovation qui toujours selon lui entre dans le cadre des « objectifs liés à l’humanisation de la sanction pénale. » Le Sénégal évoque depuis 2018 l'introduction du bracelet électronique comme alternative à la prison. Elle a été approuvée en juillet 2020 par les députés.

1 000 bracelets électroniques sont déjà disponibles, 1 000 autres ont déjà été commandés.


Pourquoi le Sénégal introduit-il le bracelet électronique pour les détenus ?


La surpopulation carcérale est un des défis auxquels le système judiciaire sénégalais a du mal résoudre.

Isamila Madior Fall, ministre sénégalais de la Justice, a d’ailleurs rappelé la volonté du président Sall de prôner « les mesures alternatives à l’application des peines ainsi que l’aménagement des peines. Afin de désengorger les prisons. »

Selon l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) citée par Amnesty international, « la population carcérale a doublé au Sénégal en 20 ans, passant de 4891 détenus à 11547 en 2019. La capacité de détention actuelle est limitée à quatre mille deux cent vingt-quatre (4224) pour une population carcérale pouvant atteindre des pics de douze mille (12000) détenus. »


À cela, s’ajoute le problème des longues détentions préventives qui font l’objet de vives critiques dans le pays.

M. Fall reconnaît d’ailleurs l’échec des politiques d’aménagement des peines entreprises par l’Etat.

« Jusque-là, la mise en œuvre de la plupart des modes d’aménagement des peines est restée timide, n’a pas atteint tous les résultats escomptés alors que des mécanismes comme la libération conditionnelle et la réduction des peines permet pas à eux seuls de désengorger significativement les prisons encore moins d’atteindre les objectifs liés à l’humanisation de la sanction pénale », reconnaît-il.

« Le recours au bracelet électronique comme alternative à la détention provisoire et mode d’aménagement des peines s’avère particulièrement intéressant pour réduire les mandats de dépôt et limiter les peines privatives de liberté », poursuit le ministre sénégalais de la Justice lors de l’inauguration du centre de surveillance électronique.


Quelles sont les personnes qui pourront bénéficier du placement sous bracelet électronique ?


Selon Alassane Ndiaye, coordonnateur du tout nouveau centre de surveillance électronique, les personnes qui peuvent bénéficier du placement sous surveillance électronique, elles sont de trois catégories :

les personnes qui font l'objet d'une information judiciaire : il faudrait que l'infraction pour laquelle elles sont poursuivies soit punie au moins d'un emprisonnement de trois ans.

Les personnes qui comparaissent devant une juridiction de jugement : c’est-à-dire lorsque la juridiction (correctionnelle ou criminelle) décide ou prononce une peine d'emprisonnement égale ou inférieure à trois ans. Ces personnes peuvent bénéficier du placement sous surveillance, c'est-à- dire la gestion du jugement décidera de substituer le bracelet électronique à la peine d’emprisonnement.

Les personnes qui ont déjà fait l'objet d'une condamnation et qui purgent leur condamnation dans un établissement pénitentiaire : la loi précise que pour bénéficier du placement sous surveillance électronique, il faudrait que le restant de la peine à purger soit au moins égale à six mois et ne dépasse pas un an.


« On peut considérer qu'il y a une quatrième catégorie de personnes qui échappe aux critères liés à la peine. Il s'agit des personnes malades ou des personnes âgées, que ce soit devant le juge d'instruction, la juridiction de jugement ou lorsque ces personnes exécutent une décision de condamnation dans un établissement pénitentiaire, les critères liés à la durée de la peine ne seront pas considérer » tient à préciser M. Ndiaye.


Quelle va être l'utilité du centre de surveillance électronique ?


Le centre a pour but selon Alassane Ndiaye, d’observer et de contrôler les différents déplacements des personnes qui bénéficie de la mesure de placement sous surveillance électronique bracelet électronique à l’aide d’écrans qui sont installés au centre.

« Il y a également des agents de l'administration pénitentiaire qui doivent rester dans le centre vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept afin de pouvoir vérifier les déplacements de l'ensemble des personnes qui sont placées sous surveillance électronique », précise-t-il.

« Ce centre reçoit aussi les décisions de placement sous surveillance électronique qui sont traitées avec les données qu'il va falloir intégrer afin de pouvoir avoir toutes les informations pour chacune des personnes qui a bénéficié de la mesure », renchérit M. Ndiaye.

Est-ce une solution au désengorgement des prisons dues aux longues détentions préventives ?

L’initiative consistant à placer des personnes sous surveillances électroniques est bien accueillie par l’Association de soutien aux détenus.

Néanmoins, Ibrahima Sall estime qu’elle ne constitue pas une panacée pour désengorger les prisons sénégalaises.


M. Sall déplore l’état des prisons sénégalaises dont la plupart sont héritées de la colonisation. « Ce sont des fortifications de l’administration coloniale », assène-t-il. Elles ne répondent pas aux normes requises par la loi. « Le Sénégal compte trente-sept (37) prisons, héritées presque toutes de l’administration coloniale française. La plupart des prisons sont vétustes et surpeuplées », indique un document d’Amnesty International.

Selon M. Sall « trente-trois (33) de ces prisons ont largement dépassé leur capacité. »

De plus, le Sénégal fait face à un nombre insuffisant de magistrats.


Le Sénégal compte quatre cents (400) avocats pour une population de dix-sept (17) millions d’habitants, presque tous établis à Dakar et 546 magistrats, soit 03 magistrats pour 100 000 habitants, un chiffre très en deçà de la norme internationale qui est de 10 magistrats pour 100 000 habitants.


Papa Atou Diaw

Role, Journaliste Sénior


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